Réputée pour son vaste littoral et ses plages de sable, la Vendée met aussi désormais en avant la recharge des eaux superficielles. Premier du genre en France et en Europe, le programme Jourdain assurera la réutilisation des eaux usées traitées pour la production indirecte d'eau potable.
Située sur la côte ouest de la France, la Vendée est l'une des destinations de vacances les plus populaires en raison de la beauté de son littoral, de ses villes historiques et de ses villages pittoresques nichés dans un cadre bucolique et idyllique. Cependant, la région est confrontée durant les mois d’été à des pénuries d'eau croissantes qui pèsent sur le tourisme, l'ensemble de l'industrie et les résidents.
Ces 20 dernières années, la Vendée a connu de graves épisodes de sécheresse. De fait, plusieurs investissements conventionnels avaient déjà été engagés par Vendée Eau – le service public en charge de l’approvisionnement en eau – dont un programme d'économie d'eau très efficace. Mais en dépit des 50 millions de mètres cubes d'eau potable produits par an, la région peinait encore à satisfaire ses besoins, alors que la demande ne cesse d'augmenter.
En outre, les autorités savaient qu'elles devaient aussi contrer les effets du changement climatique, l'approvisionnement en eau de la Vendée étant fortement tributaire des eaux de surface, qui sont plus sujettes aux phénomènes accrus d’évaporation et de convection. En effet, conséquence directe du changement climatique, les projections montraient que 100 000 habitants supplémentaires seraient exposés au manque d’eau potable lors des années très sèches.
Vendée Eau devait donc agir… et c’est exactement ce qu’il a fait.
S'inspirant des pays voisins, comme la Belgique, l'Espagne et l'Allemagne, qui réutilisent l'eau pour la recharge d’aquifères, Vendée Eau a souhaité aller plus loin et s’est penché sur la réutilisation des eaux usées traitées (REUT) pour la recharge des eaux superficielles.
« Compte tenu du grand volume d'eaux usées traitées disponibles mais rejetées directement dans l'océan depuis une zone touristique non côtière se trouvant à proximité, la réutilisation pour la production indirecte d’eau potable a été jugée très intéressante à explorer », explique Jérôme Bortoli, directeur de Vendée Eau.
Le schéma de réutilisation prévu en Vendée vise à recharger partiellement la retenue du Jaunay avec des eaux recyclées provenant de la station d'épuration des Sables d'Olonne, située à 20 km. « Cette solution pourrait fournir un volume supplémentaire atteignant jusqu'à deux millions de mètres cubes d'eau potable, soit la moitié de la capacité de stockage de la retenue du Jaunay », explique Jérôme Bortoli.
Le principal défi auquel Vendée Eau était confronté est le suivant : bien que d'autres pays en Europe utilisent des eaux recyclées pour la recharge d'aquifères, il n'existe aucune référence de ce type en France et, actuellement, aucun cadre réglementaire concernant la recharge des eaux superficielles ou la réutilisation des eaux usées pour la production indirecte d'eau potable.
Vendée Eau devait donc agir… et c’est exactement ce qu’il a fait.
Jérôme Bortoli poursuit : « La pratique de réutilisation pour la production indirecte d’eau potable n'est pas encore couverte par la réglementation française – ou européenne – actuelle qui n'autorise que les usages à des fins d'irrigation. Ainsi, le programme Jourdain sera le premier du genre en Europe pour la recharge des eaux superficielles et, à ce titre, il est porté collectivement comme un “open démonstrateur” pour l’expérimentation. »
Le programme Jourdain comprend plusieurs infrastructures, dont une unité de traitement tertiaire, une canalisation d'eau recyclée de 25 km, ainsi qu’une zone de transition végétalisée spécialement aménagée, et Vendée Eau a mis en place une gouvernance régionale.
« L'objectif est de construire les installations, puis de surveiller attentivement le système en fonctionnement pendant trois à cinq ans, avant de décider de lancer, ou non, un programme à grande échelle », ajoute Jérôme Bortoli.
Le programme Jourdain doit maintenant démontrer et garantir que la réutilisation des eaux usées traitées aura des impacts limités, conformes à tous les usages de l'eau : activités récréatives et production d'eau potable.
Par ailleurs, et au-delà des aspects techniques, les questions sociales et de gouvernance sont prépondérantes. Ainsi, Vendée Eau a lancé des actions coordonnées pour inciter au respect de la réglementation, susciter la confiance et une vaste mobilisation des parties prenantes qui doivent être impliqués, depuis les collectivités locales et les consommateurs jusqu'aux institutions nationales et aux services de santé.
Ce programme innovant et ambitieux permettra de recréer le cycle de l'eau de manière planifiée et maîtrisée, afin de garantir la sécurité de l'approvisionnement en eau potable des Vendéens.
Vendée Eau a entamé les discussions en décembre 2019 et le 9 juillet 2021, le contrat pour la construction de l'unité d'affinage Jourdain était signé à La Roche-sur-Yon, en présence de Jacky Dallet, président de Vendée Eau, Martin Gutton, directeur général de l'Agence de l'eau, Antoine Frérot, président-directeur général du groupe Veolia et Jean Jouzel, climatologue.
Vendée Eau procède à des essais de réutilisation de l'eau dans le cadre de son programme Jourdain. Le procédé – consistant à réutiliser les eaux usées traitées en les pompant dans les cours d'eau à l’amont des barrages dans les zones qui souffrent de pénurie d'eau – est une première en Europe. La construction est en cours, les essais commenceront en 2023 et la pleine production est prévue pour 2026. La technologie au cœur de ce projet est le Barrel™, une citerne d'ultrafiltration et d'osmose inverse basse pression, conçue par Veolia Water Technologies, qui contient 200 éléments membranaires, une désinfection par ultraviolets et une chloration.
Pascal Playaud, directeur OTV Centre Ouest et Caraïbes - Veolia Water Technologies :
« L'unité de traitement tertiaire utilisée dans le cadre du programme Jourdain répond à un besoin crucial : la réutilisation des eaux usées au moyen de l'une de nos dernières innovations, le Barrel. Ce projet, grâce à son unité d'affinage, vise non seulement à fournir une source d'eau potable fiable pour l'avenir mais aussi à réduire l'empreinte environnementale de nos clients. Et cela, tout en générant une rentabilité et un potentiel de croissance pour l'ensemble du groupe Veolia, offre un très bon exemple de notre performance plurielle. »